Manteau de cour 1430-1440

Dans quelques occasions extraordinaires, le reconstituant a la possibilité de faire étalage de ses atours: manteau, chaperons, carcant... L'Homme se fait alors considérablement coquet (après tout, il n'y a pas de raison). Joli Papa m'a de fait commandé un costume pour l'occasion, plus particulièrement un manteau 1430 en brocart de soie. À vrai dire, on aurait aussi pu choisir du velours.
Je déconseille fortement à ceux et celles qui veulent faire simple de travailler le brocart de soie, au passage.

Heures de Dunois, v. 1440-1450, Ms Yates Thompson, BL, fol. 4










Il est extrêmement difficile à l'heure actuelle de trouver un brocart de soie aux motifs médiévaux. Quand, comme dans mon cas, vous ne trouvez pas nécessairement ce qu'il vous faut, choisissez un motifs s'accordant à l'esthétisme de l'époque. Ce brocart de soie, en provenance de chez Sartor, joue d'avantage sur les reflets (noirs et dorés) que sur les motifs. 
Après quelques recherches (merci Adrien Harmand) et quelques études iconographiques, j'ai déterminé la coupe la plus commune du manteau 1430.

Deccaméron, Boccace, v. 1440, BnF Fr. 239, fol. 212v (détail)
Idem fol. 102v (détail)













Ledit Joli Papa ne souhaitant pas que je pourfile l'ouverture à l'avant avec de la fourrure, et désirant par ailleurs des manches à crevées, j'ai donc choisi un autre modèle, plus sophistiqué.

Idem, fol. 275v
Heures de Dunois, v. 1440-1450, Ms Yates Thompson 3, BL, fol. 12















Comme il faut adapter le manteau à la période, à l'âge et à la morphologie, j'ai modifié la longueur. Fréquemment, les hommes de l'âge de Joli Papa, hommes d'âge mûr représentant la sagesse, sont figurés avec un manteau descendant jusqu'au cheville. Cependant, sa très honorable stature et son inestimable gourmandise (aucune critique, je suis gourmande aussi) ne souffrent pas un manteau trop long. Question d'élégance et de principe. Comme aucune miniature de ma connaissance ne représente de Mr Gourmand (ni de Mme Gourmande d'ailleurs), j'ai donc choisi la longueur standard 1430, aux environs du genoux. un jour peut-être, dans quelques centaines d'années, quand j'aurais pu étudier toutes les miniatures, je reviendrais sur cette position.
Voilà donc ce que ça donne :















Je l'ai doublé de lin bleu et pourfilé de (fausse) fourrure d'ours. J'aurais pu y monter un col, ou à tout le moins le couper avec un col rond, mais j'ai choisi volontairement cette forme afin de laisser apparaitre le col du pourpoint. Les manches sont pertuissées, c'est-à-dire qu'elles sont bombées au coude par un système de fronces à l'emmanchure et au poignet. Ces fronces sont cachées au poignet par la fourrure. C'est une coupe classique de la manche de la robe 1430.
On peut traditionnellement fixer les plis du manteau ou de la robe. Je ne l'ai pas fait par manque de tissus et pas manque de temps (c'est à dire que Sartor vend en quantité limité des lais de 74cm sur 90. Ça surprend un peu). Le choix du manteau au détriment de la robe tient surtout de la pratique. On ôte plus aisément un manteau qu'une robe . je l'ai donc fermé au moyen de quatre crochets, qui permettent d'en moduler l'ouverture et de laisser apparaitre le pourpoint à l'avant de l'encolure.
 Prestance, quand tu nous tient...

Gippon 1430-1470

Sur les camps, il fait souvent bon, et les hommes ont toujours plus chaud que les femmes. de par le fait, ils mettent rarement leur pourpoint en été. Pour autant, ils ne peuvent pas toujours décemment se promener en chemise (par moins de 30 degrés, au delà, on avise). Comment s'habiller alors? Au XVè, quand il fait bon, qu'on va travailler sans porter la cotte, on porte un gilet.
 
Annonce au bergers, Heures de Charles d'Angoulême, Lat. 1173.
Le gilet se coupe comme le pourpoint, sans les manches et sans le col. Il est assez simple à réaliser. On le retrouve comme vêtement de travail tout au long du XVè siècle, d'avantage à partir de 1440, et très fréquemment à partir de 1470. Florent Véniel en a réalisé un pour son très bon ouvrage Le costume médiéval.















Si Florent Véniel l'a conçu en quatre parties, deux devant et deux derrière, sans basques, j'ai choisi de le couper d'après le patron du pourpoint à quatre quartiers, comme sur les miniatures, avec une couture à la taille.



Celui-ci est fait de lin bleu, doublé de blanchet, un grosse toile de lin blanc (entre nous, c'est un drap d'Emmaüs). Certains pourront le faire en drap de laine, avec les chutes de leurs chausses.
Ça ne se voit pas, mais j'ai également choisi de faire un col rond au dos. Le gippon est attaché par quatre aiguillettes fixé aux chausses. La manière de le lacer est déterminée par la période choisie. À partir de 1480, on peut le voir fermé au moyen d'une seule lucette. L'ouverture n'est d'ailleurs plus bord à bord, mais s'ouvre en V, resserrée à la taille, et les basques diminuent pour devenir presqu'inexistantes. On peut également y ajouter un col.

Livre des Simples Médecines, St Pétersbourg, Fr. F. V. VI. 1

C'est un vêtement vraiment facile à faire, même par des débutants, et largement apprécié par ces messieurs.

Houppelande 1430-1445


Quand on fait de la reconstitution médiévale, on se rend vite compte que le soir il fait froid, mais que pour autant, la cape (vêtement de pluie, je tiens à le préciser, qu'on prend à tort pour se protéger du froid), n'est absolument pas pratique lorsque l'on doit s'occuper du feu, cuisiner, manger, laver... Toutes les tâches quotidiennes en somme.
Mes recherches m'ont donc amener à étudier le vêtement chaud. Un vêtement chaud ET pratique.
La houppelande est tout à fait adaptée. Très ample, elle est, contrairement à la cape, fermé sur la hauteur, comme une robe. Elle est au minimum pourfilée, c'est-à-dire ourlée de fourrure, et au mieux entièrement doublée.
On a tendance à croire que les houppelandes sont affublées de grandes manches peu fonctionnelles. Cette idée n'est pas totalement fausse, mais dans la pratique, la forme de la manche est différente.

Heures de Dunois, Ms Yates Thompson 3, BL, 1440-1450


Décaméron de Boccace, BnF, Fr. 239, v. 1440















J'ai pour ma part choisi de reproduire la houppelande de "Marie Madeleine lisant" de Van der Weyen.

Van der Weyden, Marie Madeleine, Londres, 1438.


















 La plupart du temps, les plis sur la poitrine sont fixes. Par faute de temps, je n'ai pas choisi ce principe.

Portrait d'une femme, Van der Weyden, vers 1435.


Quentin Metsys, Le peseur d'or et sa femme, 1444.





 Je l'ai faite en drap de cachemire, doublé de lin de couleur naturel. L'avantage du drap de cachemire c'est qu'il est chaud et peu épais. On pourrait également la faire en drap de laine.
Je l'ai pourfilé de lapin naturel, mais je ne l'ai pas entièrement fourré (trop peu de courage).
Elle se porte avec un bandier, cette large ceinture de soie ou de velours agrémenté d'une large bouterolle et d'un mordant décoré, ou plus communément d'un lacet.

Détail de la Déposition de Croix, Van der Weyden.




Corset 1440/1470

Le corset est ce vêtement porté sur la chemise et souvent sous la robe. Il est très rare de le voir dans son entier, car on le porte seul uniquement dans le cadre domestique. Pourtant les miniatures nous en laisse à voir une partie, souvent sous la robe relevée.

Détail de la Visitation, Van der Weyden, Leipzig,1435-1440
Détail du triptyque de la Crucifixion, Van der Weyden

Ce corset est souvent présenté par les peintres flamands en brocart de soie doré, mais il peut également être de soie unie. Quant à la forme, elle demeure très simple, poche du corps puisqu'il se porte sous la robe, à peu de choses près de la même coupe que le corset rural.

Comme je comptais le porter sous une robe à tassel en damas, j'ai choisi de le faire en brocart.
Trouver un beau brocart de soie au motifs médiévaux n'est pas chose facile. Je ne pourrais malheureusement pas vous conseiller d'aller au Marché Saint Pierre, au "Bonheur des Dames", là où j'ai acheté le mien car en réalité il s'agissait d'un immense coup de chance.
Voilà donc ce que je voulais trouver et ledit brocart :

Hans Memling, Marie Madeleine


















Coup de chance donc. Voilà au final, ce que donne une reconstitution de corset 1440-1470:



Le corset est toujours très décolleté car on ne doit pas le voir sous la robe. C'est à chacune d'en déterminer le décolleté, en fonction de la robe qui le recouvrira. Je l'ai fermé à l'avant par des anneaux dorés cousus à l'intérieur. De cette façon on ne voit pas le laçage. Il est ceinturé par un demi-ceint de cuir noir au capsula de lion, d'après un demi-ceint de Van der Weyden.



On peut trouver ces capsula sur le site Armour an Castings. Il suffit d'y ajouter une chaine et au bout un pendant ou un pomandier.